Si je veux me souvenir au mieux de notre langue d’oc telle qu’on la parlait dans le temps en Périgord, si je veux la retrouver dans toute sa saveur, j’ai besoin, moi, de revoir par la mémoire les gens d’autrefois en train de discuter. Revivent ainsi devant mes yeux tous ces hommes et femmes qui allaient et venaient autour de moi dans le Bergeracois lorsque j’étais gosse. Considérant alors dans mes souvenirs ce qui s’était passé près de moi à l’époque, ou ce qui, enfant, se racontait en ma présence, souvent le miracle se produit : j’entends encore parler tous ces anciens, aujourd’hui disparus. Je puis ainsi écouter à nouveau ce qui s’était dit à cet instant ! Et parmi tout ce que je réentends, il n’est pas rare que je retrouve une expression, une manière de dire ou un mot que j’avais oublié. Mais, vous le savez comme moi, la mémoire, assez souvent, se souvient mieux de ce qui sort un peu de l’ordinaire. C’est ainsi que me sont revenus peu à peu, l’un après l’autre, tous ces exploits, petits ou grands, des facéties le plus souvent, mais pas toujours, que j’ai aussitôt notés. Si bien qu’enfin j’ai songé à les rassembler dans un livre que j’ai appelé « les contes de la pie ». Je l’ai fait parce que, je me suis aperçu qu’à travers toutes ces histoires, quelque chose d’autre apparaissait : une foi, un sens de la vie, une civilisation, oserais-je dire, en somme un peu du cœur le plus profond et de l’âme de nos anciens. Le plus beau, c’est que ces contes sont presque tous réels… ou me furent donnés pour tels. Et, connaissant les Périgourdins comme ils étaient à l’époque, oui, tous ou à peu près, pourraient bien être vrais ! Alors je ne vois pas pourquoi vous ne devriez pas en profiter vous aussi.